Les pratiques anti-concurrentielles des acteurs du secteur surveillées par la Commission !
L’explosion de l’esport et plus généralement de l’industrie vidéoludique fait naître une concurrence accrue et en constante augmentation entre les éditeurs de jeux. En effet, en matière de concurrence, la logique voudrait que les acteurs en position de force, soit les vendeurs, ne s’accordent pas sur leurs pratiques et fassent jouer les différences de prix et de services pour que les consommateurs (ou acheteurs) aient une offre la plus complète et la plus étendue possible.
Cependant, il arrive dans certains cas que des vendeurs s’accordent sur certaines pratiques au sein d’une même région (l’Union Européenne en l’occurrence), obligeant les entités supra-étatiques à légiférer. C’est le cas de l’Union Européenne qui, en politique de marché, tente de maintenir un niveau de concurrence élevé entre tous ses acteurs. Pour cela, elle érige un certain nombre de réglementations : en termes d’ententes, d’abus de position dominante, de concentrations et plus généralement en interdisant les pratiques anticoncurrentielles.
C’est précisément pour certaines pratiques jugées anticoncurrentielles par la Commission Européenne que Valve et cinq autres éditeurs se sont vu infliger une amende et notamment pour une pratique interdite depuis un Règlement de 2018 : le géoblocage. En effet, c’est le Règlement n°2018/302 du 3 décembre 2018 qui a interdit au sein de l’Union Européenne le géoblocage « injustifié ». Selon la Commission Européenne donc : un consommateur résidant dans un Etat membre de l’Union Européenne doit pouvoir commander des biens et des services dans toute cette région, et ce dans les mêmes conditions (pour le même prix et les mêmes conditions de livraison). Cette interdiction du géoblocage s’impose théoriquement à tous les professionnels établis dans l’Union Européenne ou dès qu’ils exercent leurs activités au sein de l’Union. Le but de cette réglementation ? Préserver le libre-échange au sein du marché intérieur de l’Union Européenne. Même si une liste d’exceptions est présente à l’Article 2 de la Directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, force est de constater que les plateformes de gaming n’y figurent pas. Le géoblocage est donc applicable en la matière.
La Commission Européenne a reproché à Valve et aux cinq autres éditeurs en cause de ne pas avoir respecté ce Règlement car en théorie, les professionnels ont l’interdiction de limiter ou bloquer l’accès à l’interface en ligne du professionnel pour des motifs liés à la nationalité, au lieu de résidence ou au lieu d’établissement du consommateur. Pourtant, c’est bien ce que ces derniers ont fait en ayant délibérément bloqué les clés d’activation de certains jeux vidéo sur PC de certains utilisateurs. La Commission estime d’ailleurs à ce titre que les mis en cause ont conclu des accords bilatéraux visant à empêcher les consommateurs d’acheter ou d’utiliser certains jeux achetés ailleurs que dans leur pays de résidence, ce qui est contraire aux règles anticoncurrentielles posées par l’Union Européenne en termes d’entente et d’abus de position dominante.
La Commission Européenne craignait en effet que :
- ● Cette pratique ait pu empêcher les consommateurs d’acheter des jeux moins onéreux dans d’autres Etats membres ;
- ● Les éditeurs aient inclus des restrictions contractuelles à l’exportation dans leurs accords avec d’autres distributeurs que Valve, cela ayant pu empêcher les consommateurs d’acheter des jeux vidéo vendus par ces distributeurs et d’y jouer.
Selon elle, ces pratiques ont « pour effet de cloisonner les marchés nationaux en fonction des frontières nationales et de limiter les ventes passives aux consommateurs et ont ainsi empêché ces derniers de profiter des avantages du marché unique numérique de l’UE ».
Après enquête, la Commission a confirmé ses griefs dans un jugement publié le 20 janvier 2021 et allouant une amende importante aux 6 professionnels concernés. Valve, qui n’avait déjà pas souhaité coopérer sur l’enquête, a décidé de faire appel de la décision.